2021 : difficile clap de fin pour le charbon en France

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Publié le 22 février 2021

Conformément à la promesse de campagne d'Emmanuel Macron, les quatre dernières centrales à charbon françaises doivent fermer leurs portes d’ici la fin de l’année, sur fond d’exception à Cordemais et de projets de transition contestés ailleurs. En outre, le gestionnaire du réseau électrique RTE a déjà prévenu que la sécurité de l'approvisionnement devra de fait faire l'objet d'une vigilance en 2022-2023.

Par ici la sortie. La France s’apprête à tourner la page du charbon. À Gardanne, dans les Bouches-du-Rhône, la centrale est déjà à l’arrêt et ne devrait pas redémarrer. Un plan de sauvegarde de l’emploi, visant une centaine de salariés sur 160, est actuellement négocié sur fond de tensions. "Sur le terrain, la transition énergétique rime avec fermeture d'entreprises et chômage de masse. Au total ce sont 1 000 emplois indirects qui vont être impactés dans la région. C'est un massacre ! Nous n'avons plus de contact avec le délégué interministériel chargé du dossier", assure Nadir Hadjali, salarié depuis 20 ans à la centrale, syndiqué à la CGT.

Fin décembre, un pacte territorial de transition écologique a été signé avec la société détentrice GazelEnergie (filiale du groupe EPH détenu par l'homme d'affaires tchèque Daniel Kretinsky), l'Etat et les collectivités locales afin de construire un avenir durable pour le site. L’axe principal consiste à relancer la centrale biomasse existante, elle aussi à l'arrêt en raison notamment d’une procédure administrative. Les défenseurs de l'environnement s'inquiètent que cette "méga-centrale soit autorisée à brûler 850 000 tonnes de bois par an" entraînant des "coupes trop importantes dans des forêts méditerranéennes déjà fragilisées".

Charbon vs biomasse

Même scénario ou presque à la centrale de Cordemais, en Loire-Atlantique, propriété d’EDF, la seule autorisée à fonctionner, à 10 % de ses capacités, au-delà de 2021 pour des raisons de sécurité d’approvisionnement. Le projet Ecocombust y est lui aussi très critiqué. L'électricien souhaite produire, dès 2022, de l’électricité en mixant 20 % de charbon et 80 % de biomasse fabriquée à partir de granulés de bois issus de déchets d'ameublement ou de construction. Une fois que la centrale fermera définitivement ses portes, au plus tard en 2026, l'objectif est de poursuivre la production de pellets.

Mais la biomasse fait l’objet de nombreuses critiques, y compris au sein même du gouvernement. Rien qu'en Europe, il existe 67 projets de conversion de centrales à charbon en centrales à biomasse, selon un rapport du think tank Ember paru en 2019. Pour les alimenter en pellets, il faudrait couper 2 700 kilomètres carrés de forêt chaque année. Mi-février, un groupe de plus de 500 scientifiques du monde entier a écrit à l'Union européenne, aux Etats Unis, au Japon et la Corée du Sud pour les alerter sur le fait que la biomasse-énergie était loin d'être neutre en carbone.

"Dans l'ensemble, pour chaque kilowattheure de chaleur ou d'électricité produite, le bois pourrait ajouter deux à trois fois plus de carbone dans l'air que les énergies fossiles", préviennent-ils. "La repousse demande un temps que le monde n'a plus pour résoudre le changement climatique. Comme de nombreuses études l'ont montré, la combustion de ce bois va accroître le réchauffement pendant des décennies, voire des siècles, même lorsque le bois remplace le charbon, le pétrole ou le gaz naturel. Pour atteindre la neutralité carbone, vos gouvernements devraient travailler à préserver et restaurer les forêts, pas à les brûler".

Une vigilance sur l'approvisionnement

Des craintes existent aussi côté approvisionnement alors que la France a dû rallumer ses centrales à charbon dès le mois de septembre faute de productions nucléaire et éolienne suffisantes. Le gestionnaire du réseau électrique RTE a déjà prévenu que la sécurité de l'approvisionnement devra faire l'objet d'une vigilance en 2022-2023, en raison de l'arrêt programmé des centrales à charbon, couplé à la fermeture de Fessenheim et au retard pris dans le chantier de l’EPR de Flamanville. Après 2023, la sécurité d'approvisionnement devrait toutefois s'améliorer, indique RTE.

Outre Cordemais et Gardanne, la France compte deux autres centrales à charbon, au Havre (Seine-Maritime), où la fermeture est prévue le 31 mars 2021, et à Saint-Avold (Moselle), qui doit fermer au deuxième trimestre 2022 pour se reconvertir dans la production d’hydrogène renouvelable.

Concepcion Alvarez @conce1

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