Fondée en 2022 par cinq industriels, dont le français Alcen, Gauss Fusion se donne 20 ans pour réussir l'ambitieux pari de connecter un réacteur à fusion nucléaire au réseau électrique. Portrait de cette start-up européenne, en pleine levée de fonds et sur le point d’ouvrir son bureau en France.
Accélérer la commercialisation d’un réacteur à fusion nucléaire en Europe et ne pas se laisser distancer par la Chine et les États-Unis. Voilà la raison d’être de Gauss Fusion, fondé en 2022 par cinq industriels européens. Avec un calendrier ambitieux : construire et connecter au réseau électrique un réacteur à fusion avant 2045.
Pour tenir le pari, la start-up pourra s’appuyer sur les expertises de ses fondateurs. L’allemand Bruker et l’italien ASG fabriquent des câbles et aimants supraconducteurs, le français Alcen est un important fournisseur d’Iter, l’espagnol Idom un spécialiste des systèmes d’ingénierie nucléaire et l’allemand Research Instruments produit des instruments cryogéniques. Côté technologies, Gauss Fusion a choisi le confinement magnétique – par opposition à celui inertiel, préféré par exemple par les Américains au sein de l’installation de recherche NIF – et le stellarator comme installation de confinement, qui tord le plasma en fusion en forme de ruban de Möbius. Alternative au tokamak – architecture plus connue de la forme d’un donut, que l’on retrouve notamment dans Iter –, le stellarator est plus complexe à concevoir, en particulier au niveau des aimants supraconducteurs.
Fabriquer du tritium
Autre défi pour Gauss Fusion : trouver comment générer en boucle fermée du tritium à partir du lithium. «Aujourd’hui, il n’y a que 25 kg de tritium dans le monde, alors que l’on sait que la consommation annuelle de notre futur réacteur sera de 150 kg», relève son directeur technique, Frédérick Bordry. En phase de levée de fonds pour trouver 40 millions d’euros, la start-up est en train d’ouvrir un bureau dans l'Hexagone, particulièrement pour postuler aux appels à projets de France 2030. La France fait partie des pays envisagés pour la construction de la future centrale, avec l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, la Hollande ou encore la République tchèque. Les critères du choix du site : un réseau électrique résilient, un risque sismique maîtrisé et un accès à l’eau non problématique. «Cela pourrait être près d’Iter pour bénéficier de son écosystème, mais aussi sur le site espagnol qui avait été concurrent de Cadarache pour accueillir le programme international», illustre Frédérick Bordry. Alors que l’Europe livre déjà une bataille pour accueillir les gigafactories, le site de construction de la centrale de Gauss Fusion devrait être connu en 2027.
Vous lisez un article de L'Usine Nouvelle 3732-3733 - Juillet-Août 2024
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