Face à l’explosion des prix de l’énergie, l’Europe veut prévenir les risques de colère sociale

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Publié le 24 septembre 2021

Les prix du gaz explosent en Europe et dans leur foulée les prix de l’électricité. Plusieurs raisons en sont à l’origine : manque de disponibilité, problèmes de production et taxe carbone. Certains pays européens mettent en place des mesures d’urgence pour limiter l’impact sur les ménages alors que la situation rappelle celle de 2018 avec la hausse des carburants et la naissance des Gilets jaunes. De son côté l’Union européenne alerte sur son manque d’indépendance en matière d’énergie.

Alors que l’hiver s’approche et qu’il sera bientôt nécessaire de rallumer les radiateurs, les prix de l’énergie sont en train de crever le plafond. Les cours du gaz naturel faisant référence en Europe ont quadruplé en six mois. Selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE) de multiples facteurs expliquent ce phénomène. D'une part, la reprise économique mondiale après la chute de l'activité durant les confinements crée une forte demande ces derniers mois, alors que les stocks en Europe ne sont pas remplis.

D’autre part, une série de problèmes pèsent sur l'offre. Certains pays ont vu leur production baisser à cause de retards de maintenance dus à la pandémie ou d'infrastructures vieillissantes. Les importations de gaz naturel liquéfié (GNL) ont aussi reculé car l'Asie est également très demandeuse. Des travaux et un incendie en août sur des infrastructures en Russie ont limité les flux par gazoduc.

Le marché de l'électricité bat également des records : sur le marché à terme, le mégawattheure a dépassé les 109 euros en France, 112 euros en Grande-Bretagne ou 105 euros en Allemagne. Ces prix "ont presque doublé sur la plupart des principaux marchés de l'électricité et sont actuellement à leur plus haut historique", notent les analystes de Barclays, évoquant deux raisons. Premièrement le prix des matières premières (gaz et charbon) qui croissent.

Spectre des Gilets jaunes

Deuxièmement, "les prix du carbone ont augmenté de près de 80 % cette année" dans le cadre des efforts climatiques de l'Union européenne. De quoi donner quelques sueurs froides aux gouvernements alors que c’est la hausse des taxes carbones sur les carburants qui avait allumé le mouvement des Gilets jaunes en 2018. Sans compter, que la situation pourrait encore se tendre sur les marchés en cas "de baisses de production non planifiées et de grosses vagues de froid, surtout si elles interviennent tard dans l'hiver".

Face à cela, plusieurs pays commencent à mettre en place des mesures d’urgence pour relâcher la pression sur le pouvoir d’achat des ménages. La France a annoncé un chèque énergie exceptionnel de 100 euros pour près de six millions de ménages modestes. L'Espagne a décidé une baisse temporaire de l'impôt spécial sur l'électricité payé par les entreprises et les particuliers. Le Portugal a pris des mesures pour les tarifs de l'électricité.

C’est l’Italie qui va le plus loin. Le Premier ministre Mario Draghi a annoncé une série de mesures chiffrée à trois milliards d'euros afin d'amortir la flambée des prix de l'énergie pour les ménages et les petites entreprises. "Sans l'intervention du gouvernement, au cours du prochain trimestre le prix de l'électricité augmenterait de 40 % environ, et celui du gaz de 30 %", a-t-il expliqué. "Pour cette raison, nous avons décidé d'éliminer, pour le dernier trimestre de l'année, les coûts d'infrastructure du gaz pour tous, et les coûts liés à l'électricité pour les familles et les petites entreprises", ajoute-t-il.

Souveraineté et indépendance énergétique

Malgré sa rigueur sur les aides d’état et les budgets des États membres, la Commission européenne s'est dit prête à valider des "mesures temporaires" des États de l'UE face à la flambée des prix du gaz et de l'électricité. "Il existe des outils auxquels les États peuvent recourir immédiatement" pour alléger les factures énergétiques des consommateurs, a expliqué la commissaire européenne Kadri Simson à l'issue d'une réunion des ministres européens de l'Énergie et des Transports en Slovénie.

Mais au-delà de la crise actuelle, c’est une nouvelle fois la question de la dépendance de l’Europe aux énergies fossiles importées, en particulier le gaz russe, qui se pose. Kadri Simson explique que la situation actuelle "montre bien que nous devons mettre un terme à notre dépendance aux énergies fossiles étrangères, et cela aussi vite que possible". La ministre autrichienne Leonore Gewessler dénonce "une trop forte dépendance (de l'Europe) au gaz russe".

Ludovic Dupin avec AFP

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