La Suisse vote majoritairement pour la neutralité carbone et un changement radical de modèle énergétique

Il y a 1 année 628

Près de 60 % des Suisses sont d’accord pour mettre leur pays sur la trajectoire de la neutralité carbone en 2050. Cela signifie qu’ils devront s’affranchir des énergies fossiles qui représentent 75 % de leurs besoins énergétiques et qui sont toutes importées. Le premier parti du pays, l’UDC, était opposé au projet mais les alertes climatiques sont suffisamment fortes pour avoir fait basculer l’opinion.

Les Suisses donnent l’exemple de ce que pourrait être un débat sur le climat associant les populations concernées au premier chef par les choix énergétiques de leur pays. Depuis 2019, le débat est important autour de l’alignement de la politique énergétique du pays sur l’Accord de Paris. Une première initiative populaire pour les glaciers avait été lancée pour demander l’interdiction totale des énergies fossiles pétrole, fioul, gaz, charbon, à partir de 2050.  Le Parlement et le gouvernement fédéral trouvaient cette position trop radicale. Ils ont donc proposé une alternative : une loi visant à graver l’objectif de neutralité carbone dans la Constitution suisse et à changer totalement le modèle énergétique suisse mais sans interdiction ni taxes.

L’idée est de baisser progressivement la consommation d’énergies fossiles en misant sur les énergies renouvelables qui, par nature, permettront à la Suisse d’être beaucoup plus indépendante sur le plan énergétique. Les foyers recevront des aides pour changer leur système de chauffage et abandonner le fioul. Pour l’instant gaz et pétrole représentent 75 % de la consommation du pays et sont intégralement importés. Les conséquences de la guerre en Ukraine qui a entrainé la flambée des prix de l’énergie ainsi que le spectacle des glaciers qui fondent ont permis à la population de s’engager résolument dans une voie nouvelle. Cela réjouit l’un des grands défenseurs des glaciers à l’origine de la première initiative de 2019 Mathias Huss. Il a salué cette victoire des alertes scientifiques sur les contre-vérités politiques     

The Swiss population sends out a strong signal: the law for bringing the country to net zero emissions was accepted today!
What started with the #glacier initiative several years ago has now come to an end.
Very happy that the arguments of #climate science were heard! pic.twitter.com/R2O5BIk9xE

— Matthias Huss (@matthias_huss) June 18, 2023

Première campagne électorale dédiée au climat

Car le grand paradoxe suisse est que le premier parti politique du pays, l’UDC de droite radicale, était le seul parti qui appelait à voter contre. A connotation climatosceptique, il estimait que cet engagement amènerait pénurie d’énergie et hausse spectaculaire du coût de l’électricité sans oublier la défiguration des paysages par les éoliennes. Paradoxe supplémentaire, le Ministre actuel du climat, Albert Rösti est non seulement issu de l’UDC mais aussi ancien lobbyiste des énergies fossiles. Mais fonctionnement fédéral oblige, il a dû soutenir le projet dans les médias ce dont il s’est acquitté en mettant l’accent sur l’indépendance énergétique qu’apporteront au pays les énergies renouvelables.

Il faudra sans doute se souvenir de ce vote comme la première campagne électorale dédiée au climat qui a fédéré ONG environnementales et tous les partis politiques à l’exception d’un seul, celui de la droit radicale. Comme le soulignait Greenpeace Suisse :

OUI à la #loiclimat!
Une victoire qui ancre dans la loi le but d’atteindre zéro émission nette.https://t.co/TlFjiFGaHz

— Greenpeace Suisse (@gpsuisse) June 18, 2023

"Le résultat du vote montre également que les citoyens de notre pays restent attachés à l’objectif de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C afin de préserver au maximum nos glaciers, nos réserves en eau, notre agriculture et notre prospérité. Les mensonges propagés par le camp adverse lors de la campagne n’ont pas permis de semer le doute au sein de la population.”

On peut donc encore avoir une campagne politique démocratique basée sur la science. Bonne nouvelle pour le climat !

Anne-Catherine Husson-Traore, directrice des publications de Novethic

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