Plan de sobriété énergétique : les leviers les plus importants manquent encore à l'appel

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Publié le 20 juillet 2022

Face aux risques de pénurie d'énergie annoncés l'hiver prochain, le gouvernement a lancé fin juin plusieurs groupes de travail réunissant les administrations publiques, les entreprises privées, les partenaires sociaux, les acteurs de la grande distribution et des experts de la transition. L'objectif est d'aboutir d'ici l'automne à des feuilles de route précises afin de réduire notre consommation d'énergie de 10 % dans deux ans par rapport à 2019. Mais pour l'instant, les mesures les plus efficaces, comme le télétravail ou la réduction de la vitesse sur autoroute, ne sont pas envisagées. 

Face à la crise énergétique, avec un sérieux risque d’approvisionnement cet hiver, et dans un contexte de changement climatique, le gouvernement a lancé fin juin une mobilisation générale pour mettre la sobriété énergétique au cœur de nos vies. Trois premiers groupes de travail ont été lancés sur "l’État exemplaire", "les entreprises et l’organisation du travail" et les "établissements recevant du public et les grandes surfaces commerciales". L’objectif : réduire la consommation d’énergie nationale de 10 % d’ici deux ans, par rapport à 2019. "On doit rentrer collectivement dans une logique de sobriété", a ainsi déclaré Emmanuel Macron lors de la traditionnelle interview du 14 Juillet.

L'État a déjà donné sa feuille de route. Dans les bâtiments publics, conformément à la loi, le chauffage sera limité à 19 degrés et la climatisation à 26 degrés. Le forfait mobilité durable pourra être cumulé avec le remboursement partiel d’un abonnement de transports en commun. La limitation de vitesse sur l’autoroute dans le cadre des déplacements professionnels des agents va être expérimentée et le télétravail renforcé. La stratégie d’achats de l’État va également prendre en compte le critère environnemental dans l’attribution d’un marché public.

Le télétravail et la réduction de la vitesse sur autoroute : pas au programme

Le deuxième groupe de travail concerne les entreprises et l’organisation du travail. Des pistes concrètes doivent émerger à l’issue des discussions paritaires sur la transition écologique qui se sont ouvertes le 8 juillet, dans le cadre de l’agenda social autonome des partenaires sociaux. Les discussions devraient se cristalliser sur le télétravail. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), qui a fait 10 propositions pour consommer moins d'énergie, ce levier serait le plus efficace s’il était mis en place trois jours par semaine, juste devant la réduction de la vitesse sur autoroute de 10 km/h et la limitation de la voiture individuelle (covoiturage, autopartage).

Ces trois mesures permettraient ainsi d’économiser respectivement l’équivalent de 500 000 barils par jour, 430 000 barils et 470 000 barils. Elles sont toutefois loin de faire consensus. Mais la crise en Ukraine et l’envolée des prix pourraient changer la donne. Un récent sondage Ifop pour l’association Agir pour l’environnement montre ainsi que plus de 6 Français sur 10 seraient par exemple prêts à réduire leur vitesse sur autoroute pour faire des économies. "À l’heure où la France connaît une nouvelle vague de chaleur exceptionnelle, l’urgence commande d’adopter des mesures fortes à effet immédiat. La réduction de 20 km/h sur autoroute est l’une des mesures les plus simples à mettre en œuvre avec un impact très significatif", explique l’association dans un communiqué.

"On trottine lentement derrière un climat qui change vite"

Un troisième groupe de travail a également réuni les représentants des établissements recevant du public et des surfaces commerciales. L’ensemble des grandes enseignes - Leclerc, Auchan, Carrefour, Casino, Système U, Intermarché, Monoprix, Picard – s’engage par exemple à éteindre les lumières dès leur fermeture, à réduire l’éclairage et à maîtriser la température. Un quatrième groupe réunira dans quelques jours les acteurs du logement. Les annonces officielles sont attendues pour la rentrée avec une mise en œuvre à partir de mi-octobre. Suffisant pour passer l’hiver ?

"On trottine lentement derrière un climat qui change vite. L’action se met en place, et monte en puissance, mais elle n’est pas encore à la hauteur. (…) Les propositions de la convention citoyenne pour le climat qui allaient dans le sens de la sobriété n’ont pas été retenues. Du fait du contexte de tensions sur les prix de l’énergie et de pénuries, on voit une appropriation de cet enjeu, mais de manière tardive et contrainte. Le gouvernement maîtrise le prix des carburants, ce qui constitue des subventions cachées aux énergies fossiles, mais n’encourage pas la baisse de la vitesse sur les autoroutes ou la limitation du poids des voitures pour réduire la consommation", déplore la climatologue Valérie Masson Delmotte dans un entretien au Monde publié le 16 juillet.

Concepcion Alvarez @conce1

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