Conçu par le spécialiste français du transport par câble Poma, le nouvel ascenseur des Thermes de Saint-Gervais-les-Bains utilise les eaux usées de la commune haut-savoyarde pour diminuer sa consommation énergétique. Une première en France.
Utiliser les eaux usées comme source d’énergie. Telle est l’idée originale du nouvel ascenseur incliné inauguré samedi 3 août à Saint-Gervais-les-Bains (Haute-Savoie), au pied du Mont-Blanc. Long de 270 mètres, l'ouvrage relie le centre-bourg, situé à 850 mètres d’altitude, aux thermes de la commune, en contrebas, sur une pente de 44 degrés.
Son fonctionnement est une première en France. Sur un rail unique, la cabine circule en équilibre grâce à un contrepoids qui se déplace dans la structure de la voie. Concrètement, les eaux usées du réseau communal ont été déviées et stockées en amont vers un réservoir de 20 m³. Elles viennent remplir une ballastière sous la cabine, via un circuit de traitement d’air au charbon actif, afin de piéger les odeurs.
En station aval, ce lest se vide dans le réseau d’eaux usées. Raison pour laquelle l’ascenseur ne peut repartir instantanément une fois arrivé en gare : 70 secondes sont nécessaires pour le remplissage ou la vidange de la cuve. Même si le système nécessite une motorisation électrique complémentaire, l’avantage énergétique est indéniable. «60% des cas de charge se font sans consommation d’énergie», assure à l’Usine Nouvelle Denis Baud-Lavigne, responsable commercial de l’entreprise iséroise Poma (505 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2023 et 1500 salariés), qui a réalisé cet ascenseur des Thermes. Budget du projet : 6,12 millions d’euros, financé à la fois par la commune, le département, la région, l’État et l’Europe.
Grâce à la force gravitaire, la cabine peut grimper les 177 mètres de dénivelé en 90 secondes et transporter jusqu’à 16 personnes, gratuitement, tous les jours de 6h à 23h. Comme un ascenseur traditionnel, le système fonctionne en totale autonomie : les passagers n’ont qu’à appuyer sur un bouton dans chaque gare pour l’appeler.
Un projet d’ascenseur valléen également sur les rails
Une solution astucieuse suggérée par l’ancien ingénieur britannique Michaël Farmer, qui résidait sur place, et inspirée par les méthodes du début du 20ème siècle. Construit en 1899, le funiculaire de Fribourg, en Suisse, fonctionne par exemple encore aujourd’hui exclusivement avec les eaux usées de la ville.
«Cela reste assez peu courant, mais tout s’y prêtait dans ce cas, avec une volonté municipale et la proximité des canalisations», indique Denis Baud-Lavigne. «En rapprochant les bourgs et en réduisant la dépendance à la voiture, nous favorisons une mobilité durable», atteste Jean-Marc Peillex, le maire de Saint-Gervais et vice-président du Conseil départemental de la Haute-Savoie.
La cité thermale ne compte pas s'arrêter en si bon chemin. Début septembre, elle inaugurera un ascenseur valléen (qui relie un point en contrebas d'une vallée à une localité sur les hauteurs), par câble cette fois. Il reliera le bourg de la commune à la gare du Fayet, dont les trains desservent Paris, Lyon ou encore Genève. L’ouvrage, également conçu par Poma, fonctionnera à l’année et pourra transporter 1 600 personnes par heure, aussi bien des Saint-Gervolains travaillant ou étudiant dans la vallée que des touristes. Selon la commune, cela devrait diminuer le trafic routier de 25% par jour en moyenne.